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L’extrait des Mémoires sur les Lappons et les Samoyèdes, envoyé à Mr. de Voltaire, renferme tout ce qu’il y a de plus constaté. L’auteur qui l’a composé, a passé plusieurs années parmi ces peuples et s’est donné beaucoup de peine pour examiner tout ce qui regarde leur origine, leur langue et leurs mœurs.
7.
Si, du temps de ce Cosaque qui, selon le Baron de Strahlemberg, découvrit et conquit la Sibérie avec 600 hommes, les chefs des Sibiriens s’appelaient Tsars, comment ce titre peut-il venir de César? Est-il probable qu’on se fût modelé en Sibérie sur l’Empire Romain?
Les chefs des Sibiriens, dont le Cosaque Iermack Timofeewitsch conquit le pays, n’avaient d’autre titre que celui de Kan. Ce sont les Russes, qui dans leur langue les appelaient Tsar; titre qu’ils donnaient à tous les Princes de l’Asie, qui possédaient des états indépendants. Si le mot de Tsar n’est pas originairement Slavon, il y a la plus grande probabilité, qu’il nous est venu des Grecs, dans le temps, que la Russie embrassa le Christianisme, ou peût-être encor avant. Les Russes ne donnaient d’autre nom aux Empereurs Grecs, que celui de Tsars, et la ville de Constantinople porte jusqu’à présent le nom de Tsargorod, ou ville du Tsar. Le mot de Caesar a pû être facilement mutilé et changé en Tsar, en rejettant le diphtongue œ. Les lettres c et k dans les mots étrangers se changent ordinairement en Russe dans une lettre appelée tse (ц), qui se prononce comme ts. Dans la bible, ainsi que dans plusieurs prières traduites en langue Slavonne à la fin de l’onzième siècle, on rencontre le nom de Tsar partout, ou dans les autres se trouve celui de Roi David, Salomon et quelquefois même les Empereurs Romains ne sont autrement appelés que Tsars. Les Ta-tares, ainsi que leur nom, étaient encor inconnus aux Russes avant l’irruption que ces premiers firent en 1237. Tout cela prouve clairement que le mot de Tsar ne peut pas avoir une origine Tatare[408].
8.
Knés signifie-il originairement Duc? Ce mot Duc du 10me ou 11me siècle était absolument ignoré dans tout le Nord? Knés ne signifie-t-il pas Seigneur? Ne répond-il pas originairement au mot Baron? N’appelait-on pas Knés un possesseur d’une terre considérable? Ne signifie-t-il pas Chef comme Mirza ou Kan le signifie? Les noms des dignités ne se rapportent exactement les uns aux autres en aucune langue.
Le mot Knés est Slavon, et signifie précisément ce que dans les autres langues de l’Europe on appelle Prince. Ainsi Weliki Knés veut dire Grand-Prince. L’usage ayant introduit le mot Duc pour distinguer les Princes régnants des autres, qui ne le sont pas, les étrangers, au lieu de dire Grands-Princes en parlant des souverains de Russie, les ont appelés Grands-Ducs. Le titre de Knés est employé partout et l’on dit en français Prince et en Allemagne Fürst. Seigneur s’exprime en Russie par Hosoudar; il n’y a chez les Russes aucun titre de naissance qui soit équivalent à celui de Baron. Avant la création des Comtes et des Barons, faite par Pierre le Grand, on ne connaissait d’autres titres que ceux de Knés et de Dworenin, ou Gentilhomme[409].
9.
Je suis bien aise que l’agriculture n’ait jamais été négligée en Russie; elle l’а beaucoup été en Angleterre, et encore plus en France; et ce n’est que depuis environ quatre-vingts ans que les Anglais ont su tirer de la terre tout ce qu’ils en pouvaient tirer. Leur terre est très-fertile en froment, et cependant ce n’est que depuis peu de temps qu’ils sont parvenus à s’enrichir par l’agriculture. Il a fallu que le gouvernement donnât des encouragements à cet art, qui paraît très-aisé, et qui est très-difficile.
Jusqu’à présent la Russie n’a pas eu besoin comme l’Angleterre de recourir aux moyens inventés pour augmenter la fertilité du sol. La terre y produit sans ces secours plus qu’il ne faut pour nourrir ces habitants. Dans plusieurs provinces le cultivateur n’est pas en état de mettre à profit toute sa récolte, étant éloigné des grandes villes ou des rivières qui pourraient en favoriser la consommation et le transport. En Ukraine il reste souvent la moitié des bleds sur le champ et y pourrit faute de bras. Le terroir y est fertile par soi-même, qu’on ne sait pas ce que c’est que de l’engraisser. De là le bas prix des grains dans plusieurs provinces de l’empire. Un sac de froment[410], qui est payé à Pétersbourg 150 cop., n’y coûte que 20 à 30 copieks. Le prix de toutes les autres provisions de bouche est presque dans la même proportion. Si l’empire de Russie comprenait encor deux fois autant l’habitants, qu’il y en a actuellement, il serait en état de pourvoir à leur subsistance quand même l’agriculture resterait sur le pied, où elle est à présent. Tant il y a encor de terres incultes.
10.
Je suis fort surpris d’apprendre qu’il était permis de sortir de Russie, et que c’était uniquement par préjugé, qu’on ne voyageait pas; mais un vassal pouvait-il sortir sans la permission de son boyard? Un boyard pouvait-il s’absenter sans la permission du Czar?
Il n’y avait aucune loi écrite, qui défendît absolument aux Russes de sortir du pays; mais toutes les fois que quelqu’un voulait sortir pour commercer, ou pour s’instruire en voyageant, il était obligé de demander la permission et un passeport, sans quoi il était arrêté sur les frontières; ce qui se pratique encor à présent, sans distinction de condition[411].
11.
Je voudrais savoir quel nom on donnait à l’assemblée des boyards, qui élut Michel Fédérowitz; j’ai nommé cette assemblée Sénat, en attendant que je